Comment réduire les déchets alimentaires et autres déchets organiques dans votre entreprise
Si votre entreprise produit beaucoup de résidus alimentaires, vous gaspillez peut-être de l’argent et contribuez aux changements climatiques.
Selon des recherches, chaque année, 20 % (ou 11 millions de tonnes) de tous les aliments produits au Canada finissent dans des sites d’enfouissement, où ils se mélangent à d’autres matières organiques telles que les résidus de jardin et le papier souillé. En se dégradant, ce mélange émet du méthane, un gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le dioxyde de carbone. Selon une estimation, les émissions des déchets alimentaient à eux seuls totalisent plus de 56 millions de tonnes d’équivalent en CO2 au Canada chaque année.
Comment votre entreprise peut-elle réduire le gaspillage alimentaire
Bien que toutes les entreprises doivent se préoccuper de la réduction du gaspillage alimentaire, de récentes études ont montré que la plupart des résidus alimentaires proviennent du secteur de l’alimentation. Si vous exercez des activités dans ce secteur, les aliments gaspillés ne représentent pas seulement une perte de valeur directe, mais peuvent également augmenter vos dépenses de gestion des déchets. En effet, bon nombre d’entreprises qui fournissent des services de gestion des déchets facturent au poids.
Ainsi, en diminuant la quantité de déchets alimentaires et organiques à ramasser, vous améliorerez vos résultats financiers tout en réduisant vos émissions de gaz à effet de serre.
1. Évaluer vos processus et vos pratiques d’approvisionnement
Selon Stuart Lilley, fondateur de ReFeed Canada, une entreprise de Vancouver dont la mission est de réduire le gaspillage alimentaire, les restaurants ainsi que les entreprises qui produisent, transforment ou distribuent des denrées alimentaires devraient procéder à des évaluations de leurs déchets, examiner leurs processus et se fixer des objectifs de réduction des déchets alimentaires.
Par exemple, vous pouvez rechercher les points de la chaîne de production présentant des taux anormalement élevés de déchets organiques ou de rejets et en rechercher les raisons.
«Il suffit parfois d’installer des garde-corps plus hauts sur vos transporteurs à courroie pour que les articles ne tombent pas sur le sol, explique Stuart Lilley. Des petites choses comme cela peuvent vraiment donner de bons résultats à la longue.»
Vous pouvez également réduire le gaspillage en analysant les tendances des ventes afin d’améliorer vos pratiques d’approvisionnement. De bonnes prévisions, de saines relations avec les fournisseuses et les fournisseurs, de même que des pratiques rigoureuses en matière d’achat et de planification, vous permettront d’acheter la quantité d’aliments nécessaire pour répondre à la demande de la clientèle. Une bonne gestion des stocks est particulièrement importante pour éviter les pertes lorsqu’il s’agit de ressources dont la durée de stockage est courte.
2. Réutiliser, recycler, revendre ou donner vos denrées alimentaires
Une fois que vous avez éliminé autant que possible les déchets organiques en amont de votre entreprise, vous pouvez vous attaquer aux déchets en aval, en recyclant et en réutilisant les produits.
Le recyclage consiste à transformer les déchets alimentaires en un autre produit alimentaire. Par exemple, les entreprises de services alimentaires (les hôtels, les restaurants, et même les cantines de bureau) peuvent utiliser les restes de légumes d’un jour pour préparer une soupe pour le lendemain.
La réutilisation des denrées alimentaires commence en nourrissant des personnes au moyen de produits invendus, mais comestibles. Vous pouvez revendre les aliments inutilisés ou les donner à des organisations à but non lucratif comme les banques alimentaires. La revente consiste généralement à trouver d’autres moyens de vendre des denrées alimentaires qui, autrement, seraient jetées. Par exemple, les produits préparés tels que des sandwichs peuvent être proposés à prix réduit vers la fin de la journée ou donnés à une banque alimentaire ou à un autre organisme à but non lucratif après la fermeture de l’entreprise.
À plus grande échelle, la revente et le don contribuent à résoudre l’un des plus gros problèmes de gaspillage alimentaire dans le secteur: les aliments qui sont jetés avant même d’arriver dans les magasins de détail ou dans les mains des consommatrices et consommateurs alors qu’ils sont parfaitement comestibles. Bien que les initiatives du secteur privé et la législation contribuent à réduire ce problème en encourageant l’acceptation de fruits et légumes «moches» qui ne répondent pas aux normes esthétiques, une quantité importante de nourriture est encore gaspillée chaque année.
«Il y a deux aspects à ce problème, explique Stuart Lilley. D’une part, il y a tous ces aliments qui ne répondent pas aux critères de classement et qui sont donc jetés. D’autre part, des personnes souffrent de la faim. Les banques alimentaires et autres organisations à but non lucratif sont heureuses de recevoir ces denrées, mais elles n’ont pas la capacité de les gérer.»
C’est là que ReFeed et d’autres organismes semblables au Canada entrent en jeu. Ces organismes récupèrent les produits qui ont été rejetés pour des raisons qui vont de la taille ou d’anomalies visuelles qui ne répondent pas aux exigences de classement aux accords d’achat qui sont tombés à l’eau.
Vous pouvez rechercher des banques alimentaires et d’autres organismes à but non lucratif du pays qui travaillent également en étroite collaboration avec les magasins de vente d’aliments au détail pour recueillir des aliments comestibles qui auraient été jetés et les donner à des personnes dans le besoin.
3. Transformer vos déchets alimentaires
S’il s’agit de résidus alimentaires, et donc qui ne peuvent pas être consommés dans leur forme actuelle, avant d’envisager le compostage vérifiez la possibilité de les réintégrer dans la chaîne d’approvisionnement pour qu’ils puissent servir de ressources pour une autre entreprise.
Au lieu d’être extraites, utilisées, puis éliminées (ce que l’on appelle une économie linéaire), les ressources d’une économie circulaire sont récupérées pour être réutilisées ou retraitées dans un circuit fermé. Cela nécessite beaucoup moins de ressources et génère moins d’émissions de carbone que la création d’un produit entièrement nouveau. Évaluez et regardez les synergies possibles autour de vous.
Un bon exemple de synergie est une brasserie qui produit des bières faites de pains gaspillés et récupérés et qui génère comme principal déchet de la drêche, soit un résidu de malt obtenu lors du processus de fabrication. Ce résidu alimentaire peut ensuite être utilisé par une autre entreprise comme farine pour la production de nouveaux produits de consommation.
4. Commencer à composter
Après la revente, le don et la transformation, «il ne reste que ce qui est vraiment inutilisable en tant qu’aliment», explique Stuart Lilley. Ces matières ne deviennent pas pour autant des déchets. Au lieu de cela, elles sont traitées avec des insectes et des amendements du sol pour être transformées ensuite en un sol riche en nutriments pouvant être utilisé pour faire pousser d’autres produits.
Le compostage est la dernière étape du traitement des déchets alimentaires et autres déchets organiques. Il permet de les transformer en un sol utile qui peut servir à faire pousser d’autres aliments ou d’autres plantes. Cela contribue à créer une économie plus circulaire dans laquelle les ressources restent en circulation.
Les résultats sont éloquents. En 2022, ReFeed a détourné 4,5 millions de kilogrammes de produits alimentaires des sites d’enfouissement pour les utiliser à 100 %. Cette revalorisation de déchets alimentaires représente une réduction de plus de 8 600 tonnes d’équivalent CO2 (l’équivalent CO2, ou éq. CO2, est l’unité de mesure utilisée pour le calcul de l’empreinte carbone).
«Et il ne s’agit là que de ce que nous pouvons comptabiliser directement, fait remarquer Stuart Lilley. Le chiffre réel, si l’on tient compte de l’impact sur l’ensemble du système, serait bien plus élevé.»
Louise Schwarz est copropriétaire, avec son associé Robert Weatherbe, de Recycling Alternative, une société de conseil en gestion des matières résiduelles basée à Vancouver.
«Nous ne pouvons pas extraire les ressources indéfiniment, c’est pourquoi la circularité est la seule voie possible, explique Louise Schwarz.»
Commencez par demander à votre entreprise de gestion des déchets quelles sont les options qu’elle propose pour les déchets organiques, suggère Louise Schwarz. Certaines entreprises peuvent être en mesure d’apporter des aliments et d’autres déchets organiques à une installation de compostage à grande échelle où les émissions seront capturées de manière appropriée. D’autres peuvent vous aider à mettre en place un programme sur place. Le véritable objectif, c’est éviter d’envoyer les déchets organiques vers les sites d’enfouissement. Si votre entreprise de services de transport de déchets ne peut pas vous proposer une option appropriée pour les déchets organiques, comme le compostage, envisagez plutôt l’incinération avec récupération d’énergie.
En fonction de votre propriété et de la quantité de déchets organiques que vous souhaitez traiter, vous pouvez peut-être faire votre propre compostage de base et l’utiliser pour enrichir le sol de votre terrain. Pour les quantités plus importantes, envisagez d’investir dans un composteur compacteur. Cette machine transforme rapidement les déchets organiques en une matière sèche qui occupe 80 % moins d’espace et qui est plus légère et plus facile à transporter.
«Grâce à de telles machines, de la matière doit encore être transportée ailleurs, mais beaucoup moins fréquemment, explique Louise Schwarz. Les gens trouvent généralement qu’il s'agit d’une grande amélioration par rapport aux quais de chargement remplis de bacs malodorants qui restent là à attirer les mouches à fruits jusqu’à ce qu’ils soient ramassés.»
5. Obtenir l'adhésion de votre personnel
La mobilisation et le comportement du personnel sont essentiels à la réussite de vos efforts de gestion des déchets. Veillez donc à prévoir des campagnes de sensibilisation lorsque vous lancez votre stratégie de gestion des déchets alimentaires et organiques.
«Même dans les bureaux, des changements simples comme la suppression des poubelles de bureau peuvent être extrêmement efficaces pour rappeler aux gens la nécessité de séparer les déchets organiques des autres types de déchets, mentionne Louise Schwarz. Si les membres du personnel comprennent le raisonnement sous-jacent, il n’est généralement pas difficile de les rallier à la démarche.»
«La plupart du temps, les membres du personnel veulent aider. La gestion des déchets leur permet de voir et de comprendre leur propre impact d’une manière beaucoup plus concrète que d’autres initiatives environnementales telles que l’efficacité énergétique.»
De nouvelles solutions à l’horizon
Le Canada s’est engagé à réduire ces déchets et a alloué 20 millions de dollars dans le budget fédéral de 2019 à un défi de réduction du gaspillage alimentaire, ainsi que des ressources supplémentaires pour soutenir l’action fédérale en ce qui a trait aux résidus alimentaires, y compris au sein des opérations gouvernementales. Plusieurs provinces ont également fixé des objectifs de réduction du gaspillage alimentaire et mis en place une réglementation pour l’élimination des matières organiques, y compris, dans certains cas, l’interdiction de les envoyer dans des sites d’enfouissement.
Que ce soit pour un immeuble de bureaux gérant les restes des repas du personnel, un restaurant s’occupant des restes de préparation des aliments et des repas non consommés, ou une entreprise de production cherchant une solution de rechange aux fruits et légumes rejetés, les technologies et les solutions de gestion des déchets ne cessent de s’améliorer. De nombreuses applications mobiles récentes permettent aux gens de récupérer des aliments invendus qui seraient autrement jetés.
«La façon dont vous faites les choses aujourd’hui ne sera pas nécessairement celle de demain, déclare Robert Weatherbe. Alors, si votre système actuel ne vous satisfait pas, continuez à chercher. Il existe peut-être déjà une meilleure solution.»