Comment se lancer dans l’approvisionnement durable
Même les plus petites entreprises ont besoin d’équipement et de fournitures. Mais vous êtes-vous déjà demandé s’il n’existait pas des façons plus durables de s’approvisionner?
D’après Bob Willard, fondateur et champion en chef du développement durable de Sustainability Advantage, chaque élément d’une chaîne d’approvisionnement a un impact potentiel sur les gens et sur la planète, et représente une occasion de contribuer au développement durable.
En termes simples, on pourrait définir l’approvisionnement durable ainsi: l’intégration de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) et de responsabilité sociale d’entreprise (RSE) aux processus d’approvisionnement.
Il s’agit plus précisément d’«obtenir le meilleur rapport qualité-prix en achetant les biens et services les plus durables auprès des fournisseurs les plus durables, afin de soutenir votre vision et vos buts stratégiques en matière de développement durable», explique Bob Willard.
La différence entre l’approvisionnement et l’achat
Avant toute chose, il faut comprendre que l’approvisionnement durable et l’achat durable ne sont pas équivalents. L’achat durable repose sur le choix de produits ayant un impact minimal sur l’environnement, mais il est souvent de nature transactionnelle.
L’approvisionnement durable, pour sa part, consiste à tenir compte des engagements globaux d’une entreprise à l’égard du développement durable.
Supposons par exemple que vous deviez mettre à niveau un ensemble d’ordinateurs portables. L’achat durable consisterait à choisir des ordinateurs aux caractéristiques écoresponsables (efficacité énergétique, matériaux recyclables, emballage minimal, etc.). Avec l’approvisionnement durable, vous adopteriez une vision plus globale, en considérant l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, de la production à la livraison, jusqu’à la mise au rebut des ordinateurs.
Vous pourriez notamment vérifier si l’entreprise fabricante a des pratiques de travail éthiques, si elle utilise des énergies renouvelables ou si elle propose des programmes de reprise à des fins de recyclage. Vous pourriez également déterminer si le fournisseur est en phase avec les objectifs généraux de votre entreprise en matière d’environnement et de responsabilité sociale.
«L’approvisionnement durable, ce n’est pas qu’une question de produits, soutient Monica Da Ponte, consultante principale à Shift & Build. Cela consiste également à se demander si les actions et les décisions d’une entreprise vendeuse sont conformes à ses politiques ou à ses engagements à l’égard du développement durable.»
Pourquoi l’approvisionnement durable est-il important?
Pour Bob Willard, le premier argument en faveur de l’approvisionnement durable est la nécessité de protéger notre planète contre les pires effets du changement climatique, comme la perte de biodiversité, les pénuries d’eau et de nourriture, et des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes et violentes.
«Nous avons de moins en moins de marge de manœuvre pour nous attaquer à ces problèmes. Il est temps que les entreprises prennent des mesures sérieuses pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, prévenir la pollution et les dommages à la biodiversité, et traiter leur personnel adéquatement.»
L’approvisionnement durable d’un point de vue commercial
Mais il y a aussi un intérêt économique à s’approvisionner de façon durable.
Ecovadis, qui évalue les efforts de développement durable d’entreprises du monde entier, estime que les pratiques d’approvisionnement durable peuvent augmenter la valeur d’une marque de 15 % à 30 %, réduire les coûts d’approvisionnement de 9 % à 16 %, et diminuer le coût du capital. Parmi les autres avantages, citons la réduction des coûts liés à la consommation d’énergie et à la conformité, la diminution des risques associés aux mauvaises pratiques des fournisseurs (comme le travail des enfants et la pollution), et l’augmentation des possibilités de croissance du chiffre d’affaires, par exemple grâce à de nouveaux produits ou services respectueux de l’environnement, à des prix plus élevés ou à des revenus provenant de programmes de recyclage.
Certains produits durables peuvent coûter moins cher, durer plus longtemps ou offrir une meilleure qualité. «Si vous avez à cœur la qualité et la longévité – et l’amélioration du bien-être de votre clientèle ou de vos parties prenantes – c’est l’option tout indiquée», indique Bob Willard.
Monica Da Ponte ajoute que l’approvisionnement durable peut représenter une occasion de se démarquer de la concurrence. «C’est un sujet dont une PME peut parler à ses clientes et clients, un moyen de se distinguer et de se faire connaître», explique-t-elle. Selon Ecovadis, 85 % des consommatrices et consommateurs sont plus susceptibles d’acheter auprès d’une entreprise reconnue pour son engagement envers le développement durable qu’auprès d’une entreprise qui ne prend pas position.
L’approvisionnement durable peut également aider au recrutement du personnel et à sa fidélisation. «Les gens veulent vraiment travailler pour des organisations qui partagent leurs valeurs», fait savoir Bob Willard.
Si vous souhaitez calculer le rendement du capital investi (RCI) de l’approvisionnement durable, consultez les outils gratuits offerts sur le site Web de Sustainability Advantage.
Comprendre le coût total de possession
Le coût total de possession (CTP) correspond au coût d’achat d’un actif plus ses coûts d’exploitation pendant la durée de sa vie utile, ce qui comprend l’installation, l’entretien, les mises à niveau et l’élimination.
«C’est une façon de montrer que payer un peu plus au départ peut être une décision commerciale plus judicieuse que d’acheter un produit qui coûte moins cher, mais qui offre moins d’avantages», explique Bob Willard.
Dans le domaine de l’approvisionnement durable, le CTP peut servir de cadre pour mesurer les effets liés au développement durable. Il permet d’associer un objectif clé de l’approvisionnement (la réduction des coûts) à des objectifs de développement durable (comme la réduction des impacts négatifs sur l’environnement).
Il établit aussi un lien entre le principe de faire des choix durables et la perspective d’en tirer des avantages financiers au fil du temps. Par exemple, les ordinateurs portables plus écoénergétiques peuvent avoir un prix initial plus élevé, mais ils peuvent réduire les coûts énergétiques pendant toute leur durée de vie.
Comment se lancer dans l’approvisionnement durable?
D’après Bob Willard, vous devez commencer à envisager l’approvisionnement durable dès maintenant, peu importe la taille ou le stade de votre entreprise.
«Faites-le dès que possible. Tout de suite. Non seulement pour le bien de la planète, mais aussi parce qu’autrement, votre clientèle, les banques, les investisseuses et investisseurs, et les membres de votre personnel décideront à votre place, et vous ne serez pas en mesure de réagir.»
À vrai dire, vos employées et employés peuvent devenir un atout de taille si vous les faites participer au processus de manière proactive. «C’est une démarche qui peut s’avérer un formidable exercice de renforcement d’équipe, car elle montre à vos collègues que l’entreprise se soucie de ces enjeux,» ajoute Bob Willard.
Les principaux obstacles à l’approvisionnement durable
Comme Bob Willard le dit souvent, le plus grand obstacle que les entreprises doivent surmonter pour adopter l’approvisionnement durable réside dans leur façon de penser: elles présument que le processus sera compliqué ou qu’il s’agit d’une «lubie d’écolos». Or, il n’en est rien.
«Il s’agit simplement d’ajouter quelques exigences à vos spécifications de produits et à vos évaluations d’offres, ou quelques lignes et conditions supplémentaires à vos contrats pour montrer le sérieux de votre démarche. Une fois que votre décision est prise, le soutien et les ressources ne manquent pas.»
Les meilleures pratiques en matière d’approvisionnement durable
Bob Willard a mis au point un questionnaire qui aide les entreprises à évaluer leurs progrès à l’égard de l’approvisionnement durable. Selon lui, les cinq questions ci-dessous permettent de relever les meilleures pratiques dans ce domaine:
- Disposez-vous d’une infrastructure qui soutient l’approvisionnement durable, par exemple des politiques, des objectifs stratégiques, des plateformes, des analyses de rentabilisation ou un personnel formé?
- Vous informez-vous sur les caractéristiques des fournisseurs en matière de développement durable et favorisez-vous les fournisseurs qui répondent à vos critères?
- Prêtez-vous attention à la durabilité des produits et services que vous vous procurez?
- Tenez-vous compte de ces deux derniers points dans l’évaluation des offres? Les points liés au développement durable devraient compter pour au moins 10 à 30 % de votre formule d’évaluation d’offre, d’après Bob Willard.
- Êtes-vous un modèle à suivre dans ce domaine? Par exemple, encouragez-vous d’autres entreprises à faire comme vous et partagez-vous avec elles vos outils, vos techniques et vos ressources?
Avez-vous besoin d’une politique d’approvisionnement durable?
Non, selon Bob Willard. Vous pouvez tout à fait commencer sans en avoir une. Si vous souhaitez mettre en place une politique, veillez simplement à ce qu’elle s’arrime aux valeurs générales de votre entreprise et qu’elle puisse être adaptée à vos ressources et à votre secteur d’activité. Songez à y inclure les aspects suivants:
- Des normes exigeant des fournisseurs qu’ils utilisent des matériaux respectueux de l’environnement, qu’ils aient des pratiques de travail éthiques et qu’ils observent les réglementations environnementales.
- Des exigences qui mettent l’accent sur des produits et services durables.
- Des considérations relatives aux cycles de vie, c’est-à-dire des évaluations des impacts sociaux et environnementaux des produits tout au long de leur cycle de vie.
- Une attention accordée à la diversité des fournisseurs, qui passe notamment par l’engagement à soutenir des fournisseurs issus de la diversité, locaux ou de petite envergure.
- Des approches de gestion des risques liés au développement durable, comme la dégradation de l’environnement ou des pratiques non éthiques.
- Des démarches d’amélioration continue, sous forme, par exemple, d’examens réguliers ou de mises à jour de politiques.
- Une production de rapports transparente, comprenant une documentation claire des décisions et des rapports d’avancement aux parties prenantes.
Les certifications sont-elles utiles?
Selon Monica Da Ponte, une vérification par une tierce partie peut vous donner l’assurance que les déclarations d’un fournisseur en matière de développement durable sont véridiques. Par exemple:
- Ecovadis, qui évalue, classe et certifie les entreprises, sert couramment à évaluer les activités et le rendement des fournisseurs.
- CDP, anciennement connu sous le nom de «Carbon Disclosure Project», évalue et classe les entreprises dans les domaines des émissions de gaz à effet de serre, de gestion de l’eau et de préservation des forêts.
- La certification B Corp est accordée aux entreprises qui respectent des normes élevées de performance sociale et environnementale, de responsabilité et de transparence.
- La certification Electronic Product Environmental Assessment Tool (EPEAT) aide les consommatrices et consommateurs à repérer les produits électroniques qui répondent à certaines normes de durabilité environnementale.
- Les certifications en matière de diversité, comme WeConnect, attestent qu’une entreprise est détenue en majorité par des fournisseurs issus de groupes traditionnellement sous-représentés.
L’approvisionnement durable est-il plus difficile (ou plus important) dans certains secteurs?
Il est indéniable que certains secteurs se prêtent mieux que d’autres à l’adoption de l’approvisionnement durable. Par exemple, le processus sera plus simple dans une petite entreprise de services que dans une grande entreprise de fabrication.
Mais l’approvisionnement durable est important dans tous les secteurs, souligne Bob Willard. «Il faut que cela devienne la nouvelle norme. Nous devons légitimer et mettre en lumière ces enjeux, en particulier le changement climatique.»
Envisagez de mener un projet pilote. «Prenez un échantillon de fournisseurs et d’articles plus coûteux et faites un essai, conseille le spécialiste. Voyez comment les choses se passent pour vos fournisseurs, votre personnel et votre entreprise, puis déterminez si vous voulez aller plus loin.»
Prochaine étape
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