Perspectives économiques: un retour à la normale en 2022?
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À l’image de l’économie mondiale, l’économie canadienne poursuivra sa transition en 2022, alors que la croissance dopée par la reprise pandémique fera progressivement place à une croissance plus normale. Le chemin pour retrouver cette normalité ne sera cependant pas sans embûches.
Malgré tout, les ménages demeurent en bonne position pour soutenir l’activité économique qui devrait atteindre 3,5 % de croissance au Canada en 2022.
Il sera cependant important pour les propriétaires d’entreprise du Canada de garder un œil sur leurs chaînes d’approvisionnement et l’augmentation des coûts, et de mettre en œuvre des stratégies pour pallier la pénurie de main-d’œuvre, d’autant plus que celle-ci va persister pendant plusieurs années encore.
Chiffres clés pour l’économie canadienne en 2022
Moyenne pour l’année | PIB canadien | Pétrole (WTI) | Taux de change | Taux directeur |
3,5% | 72 $US/b | 0,77 $US | 0,75% (*fin 2022) |
Une autre année solide pour la reprise mondiale
Bien que l’économie mondiale se soit remise sur pied en 2021, la situation varie grandement d’une région à l’autre, la pandémie étant encore bien présente dans certains coins du globe.
Le Fonds monétaire international prévoit que la croissance mondiale sera de 5,9 % en 2021, mais que celle-ci baissera à 4,9 % en 2022. Ce ralentissement s’explique essentiellement par l’essoufflement du rebond depuis les réouvertures et l’atténuation du soutien procuré par les politiques monétaires et fiscales.
La crise de la COVID-19 continue de mettre en lumière l’importance de l’économie chinoise dans les chaînes d’approvisionnement et le transport maritime. La croissance du pays est en perte de vitesse. Des éclosions de COVID-19 mènent à des fermetures d’usine ou de port, une crise énergétique sévit et le niveau d’endettement du secteur immobilier inquiète les investisseuses et investisseurs.
Cependant, la demande mondiale demeure solide et devrait continuer à soutenir l’économie malgré des pressions baissières.
Une légère pression à la baisse sur le dollar canadien
Les États-Unis sont l’un des quelques pays développés à avoir vu leur PIB revenir entièrement à son niveau d’avant la crise. Les mesures fiscales extraordinaires du gouvernement y ont soutenu la consommation, mais il reste beaucoup de retard à rattraper au chapitre de l’emploi. L’offre de travail devrait continuer à reprendre de la vigueur à mesure que les mesures fiscales continuent à s’atténuer tout comme les inquiétudes liées au coronavirus.
Les hausses de prix des produits de base, notamment le pétrole, ont maintenu le dollar canadien en 2021 aux alentours de 0,80 $US. Les mouvements attendus sur le marché des produits de base en 2022 exerceront une légère pression à la baisse – surtout en deuxième moitié d’année.
La divergence entre les taux d’intérêt américains et canadiens devrait toutefois aider à maintenir le dollar canadien près de 0,77 $US malgré le risque d’un changement de cap plus pressant de la part de la Réserve fédérale.
Les effets de la pandémie se font encore ressentir au pays
Au Canada, la pandémie semble toujours maîtrisée jusqu’à présent.
Le nombre de nouveaux cas quotidiens augmente, mais reste relativement faible et les mesures sanitaires s’assouplissent de plus en plus dans les provinces sur fond de taux de vaccination élevé – plus de 75 % de la population canadienne adulte est totalement vaccinée.
Malgré cette situation plutôt enviable, l’activité économique canadienne se heurte toujours aux conséquences néfastes de la pandémie qui vont se poursuivre pour une bonne partie de 2022 et, par conséquent, vont modérer la croissance au pays.
L’économie canadienne devrait continuer de croître, mais les gains seront plus modestes que ce qu’on pouvait espérer à ce point-ci du cycle économique.
La demande des consommatrices et consommateurs: principal moteur de la croissance au Canada
Les ménages canadiens demeureront la clé de la reprise économique en 2022. L’épargne accumulée par ceux-ci pendant la pandémie les place en bonne position pour soutenir l’économie et leur assure un petit coussin pour absorber une part de l’inflation. Leurs habitudes de consommation devraient toutefois retourner à la normale à mesure que les restrictions sur les secteurs des services s’assoupliront.
L’investissement résidentiel devrait contribuer positivement à la croissance en 2022 encore. Malgré les stocks restreints, le marché de la revente pourrait connaître une vague de transactions en début d’année. Les acheteuses et acheteurs qui prévoient une hausse des taux d’intérêt pourraient être plus combatifs afin de s’assurer de taux plus bas.
Cette frénésie ralentira au fur et à mesure que la Banque du Canada augmentera les taux. Ce sera aussi le cas pour les mises en chantier.
L'impulsion du début de 2021 continue à s’estomper pour le secteur résidentiel, mais la demande demeure vigoureuse et les mises en chantier vont se maintenir à des niveaux élevés.
Une impulsion forte des produits de base
La croissance du Canada va bénéficier d'une forte demande mondiale pour les produits de base. Les prix des produits de base ont grimpé en flèche pendant la pandémie de COVID-19 et devraient se maintenir à des niveaux élevés pour la majeure partie de l’année. Or, une tendance à la baisse se dessine sur fond de ralentissement industriel chinois. Le retour du balancier, des dépenses en biens vers les dépenses en services, va tempérer davantage la demande.
Le prix du pétrole devrait rester élevé au début de 2022. Une fois la saison froide de l’hémisphère nord terminée et grâce à l’augmentation continuelle, mais graduelle, de l’offre par les pays producteurs, les prix devraient légèrement baisser et revenir à des niveaux similaires à ceux que l’on observait avant la pandémie.
Les pénuries: un goulot d’étranglement pour la croissance
Le rebond rapide de la demande pour les matières premières, les biens intermédiaires et divers services logistiques s’est heurté à une offre limitée. Cette réalité a frappé plusieurs marchés et s’est traduite en hausses de prix exceptionnelles et en retards de livraison qui mettent de nombreuses chaînes d’approvisionnement sous pression.
Les problèmes engendrés par ces goulots d’étranglement vont persister pour une grande partie de 2022. Incapables de se procurer le capital productif et les intrants nécessaires à leurs opérations, plusieurs entreprises ont ralenti ou carrément arrêté leur production.
Les chaînes logistiques mondiales sont devenues si complexes qu’elles peuvent difficilement se remettre d’un bouleversement. Comme nous l’avons vu avec l’obstruction du canal de Suez pendant dix jours en 2021, une perturbation d’apparence limitée peut avoir des conséquences infiniment plus importantes sur le système dans son ensemble. C’est notamment le cas lorsqu’un port interrompt ses activités à cause d’une éclosion de COVID-19 ou qu’une usine ferme afin de rationner l’énergie.
Lorsque des goulots d’étranglement affectent les produits en amont des chaînes de production, comme les produits énergétiques et les métaux, la rareté de ces produits a des effets de débordement plus importants sur l’économie en restreignant la production d’autres biens.
Pénurie de main-d’œuvre: une tendance forte qui va perdurer
La production canadienne n’est pas seulement limitée par les intrants physiques; le pays fait aussi face à un problème de main-d’œuvre sévère.
Rareté, pénurie, adéquation des compétences… les enjeux de main-d’œuvre auxquels font face les entreprises canadiennes vont persister en 2022.
Ainsi, des gains au niveau de l’emploi s’avéreront de plus en plus difficiles à réaliser, surtout pour les secteurs des services à contacts élevés (hébergement, restaurations, etc.) qui nécessitent beaucoup de travailleuses et travailleurs. Bien que la part du PIB qui reste à recouvrer pour revenir au sommet prépandémique soit majoritairement dans ces secteurs, leurs capacités de production ont changé pendant la pandémie et le retour vers la normalité s’avérera plus compliqué pour ceux-ci.
3 stratégies éprouvées pour pallier la pénurie de main-d’œuvre
Dans une étude publiée en septembre 2021, nous avons effectué une analyse statistique avancée afin de trouver trois stratégies que vous pouvez mettre en œuvre pour vous préparer à de futures pénuries de main-d’œuvre.
- Investir dans la technologie et l’automatisation
En matière de recrutement, investir dans la technologie et l’automatisation est la mesure la plus efficace que vous pouvez prendre dans votre entreprise.
L’automatisation n’est pas qu’une question de robots. Il s’agit de toute technologie qui accomplit des tâches répétitives avec un apport humain réduit. L’automatisation libère les travailleuses et travailleurs pour des tâches à valeur ajoutée.
Il peut s’agir simplement de l’utilisation d’un logiciel pour automatiser les prévisions de ventes et le service à la clientèle, ou il peut s’agir d’une tâche aussi complexe que l’utilisation d’outils informatisés pour automatiser un atelier d’usinage. Mentionnons aussi les assistants virtuels et les messages textes automatisés, le marketing par courriel automatisé, les terminaux de commande à écran tactile et les caisses en libre-service. - Mettre en place des processus d’embauche officiels
Une deuxième stratégie de recrutement consiste à mettre en place un processus d’embauche officiel. Cela signifie qu’il faut avoir une procédure d’embauche entièrement organisée.
Trois étapes sont essentielles à la réussite d’un processus d’embauche:
- Planification: Déterminez les besoins de votre organisation
- Recrutement: Publiez l’offre d’emploi et annoncez-la afin de former un bon bassin de candidates et candidats
- Sélection: Présélectionnez les candidates et candidats et évaluez-les avant de faire une offre d’emploi
- Offrir un régime de rémunération global
Un régime de rémunération global est un excellent outil de fidélisation. Mais il ne se limite pas au salaire. Un régime de rémunération global comprend notamment:
- des salaires et des avantages sociaux concurrentiels
- des modalités de travail flexibles
- du mentorat
Inflation transitoire ou structurelle?
L’inflation inquiète de plus en plus d’observatrices et observateurs économiques. Il faut dire que l’effet de base a gonflé le taux d’inflation l’an dernier, car les prix, notamment ceux de l’énergie, ont baissé considérablement au tout début de la crise de COVID-19. Une part des hausses de prix observées dans la dernière année peut donc être attribuée à un retour à la normale.
En dépit de cet effet, il y a bel et bien des augmentations de prix. La vigueur de l’inflation observée récemment est stimulée par la flambée des prix de l’énergie, le rebond de la demande pour les services plus récemment rouverts, des problèmes de chaîne d’approvisionnement, des pénuries de conteneurs et la pénurie de main-d’œuvre.
Il est important de distinguer les pressions inflationnistes à court terme ou transitoires de celles qui sont systématiques et structurelles. Les pressions inflationnistes actuelles demeurent transitoires, mais pèsent davantage sur les perspectives et perdureront plus longtemps que ce qui avait été initialement prévu.
L’inflation devrait revenir à des niveaux plus convenables seulement vers la fin de 2022. D’ici là, la Banque du Canada aura déjà enclenché le resserrement de sa politique monétaire afin de calmer le jeu.
Cette hausse du taux d’inflation fera donc augmenter les coûts de financement. Bien entendu, les conditions de crédit demeureront avantageuses et abordables dans un avenir rapproché puisque ces hausses se feront graduellement.
Une croissance robuste malgré une pression accrue sur la capacité
Après l’une des récessions les plus sévères de l’histoire en 2020, la reprise économique s’est engagée rapidement en 2021 grâce à l’efficacité des efforts de vaccination. Alors que l’activité économique de certains pays développés s’est déjà pleinement remise sur pied, les perspectives économiques canadiennes pour 2022 s’avèrent un peu plus compliquées et le retour à la normale sera un peu moins rapide.
Cette année encore, la croissance sera limitée par des effets de débordement laissés au passage par la pandémie.
La demande va rester solide alors que les ménages vont réaffecter une partie de leurs dépenses en biens de consommation vers les services. L’offre va continuer à s’ajuster en conséquence, mais la pression sur les chaînes d’approvisionnement pourrait créer une désynchronisation de l’offre et de la demande qui aurait un effet négatif sur la croissance. Les pénuries de main-d’œuvre et l’inflation continueront aussi de limiter la croissance.
Les perspectives économiques canadiennes pour 2022 sont tout de même encourageantes. Nous devrions retrouver le niveau de PIB prépandémique dans les premiers mois de la nouvelle année, bien que plusieurs facteurs ayant contribué au ralentissement du deuxième semestre de 2021 vont entacher la reprise. Évidemment, l’évolution de la pandémie demeure le principal risque à ces perspectives.
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