Comment gérer le risque de change lors de la vente à l’étranger
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Si vous faites des affaires à l’international, les fluctuations des devises constituent un risque commercial inhérent. Cela est vrai pour les entreprises canadiennes qui s’approvisionnent à l'étranger. Cependant, pour celles qui exportent et vendent à international, le risque de change peut avoir une incidence importante sur leur rentabilité, et même sur leur position concurrentielle.
«À partir du moment où vous songez à faire des affaires à l'étranger, ou même lorsque vous fixez un prix pour votre produit ou service, le risque de change devient une réalité commerciale», explique Phil Turi, directeur, Services consultatifs à l’exportation à Exportation et développement Canada (EDC). «Comprendre le risque de change peut aider votre entreprise à être plus concurrentielle tout en la protégeant contre les changements macroéconomiques qui ont une incidence sur vos résultats financiers.»
Déterminer l’exposition de votre entreprise au risque de change
Votre niveau d’exposition au risque de change dépend de nombreux facteurs, dont le volume des ventes, la durée de votre cycle de vente, l’endroit où vous vendez, le nombre de clientes et clients que vous avez à l’international et votre niveau d’intégration aux chaînes d’approvisionnement mondiales.
Si vous ne faites que commencer à l’échelle internationale, vous pourriez décider d’attendre avant de mettre en place un instrument de couverture formel. Votre banque commerciale et une firme de courtage en devises peuvent vous aider à déterminer votre exposition au risque de change, en fonction de l’endroit où vous vendez, de ce que vous vendez et de la part de vos revenus qui est issue des ventes à l’extérieur du Canada.
Avoir recours à un instrument financier pour atténuer le risque de change
Votre banque ou une société de courtage en devises sont les mieux placées pour vous aider à déterminer quel est l’instrument financier à utiliser pour protéger vos revenus contre la volatilité des taux de change.
Les deux principaux instruments financiers sont les contrats à terme et les options sur devises.
Contrat à terme
Le contrat à terme est une entente d’achat ou de vente d’une quantité donnée d’une devise à un taux de change fixe à une date ultérieure précise. Idéalement, vous pouvez conclure un contrat à un moment où le taux de change est en votre faveur. Cela procure une certaine stabilité dans votre plan d’affaires, en vous permettant de prévoir les ventes et les revenus avec une certitude relative et d’élaborer une stratégie de tarification concurrentielle.
Options sur devises
Les options sur devises vous donnent le droit, et non l’obligation, d’acheter un certain montant de devises à une date donnée dans l’avenir lorsque le taux de change sera en votre faveur. Il s’agit également d’une entente contractuelle avec votre banque. L’inconvénient de cet instrument est que si la devise ne fluctue jamais en votre faveur, vous pourriez utiliser vos liquidités pour faire l’achat et ne jamais utiliser l’option.
«Dans les deux cas, votre banque s’attendra à ce que vous fournissiez des garanties, explique Phil Turi. Cela a pour effet d’accaparer votre fonds de roulement, dont vous pourriez avoir besoin pour respecter les modalités de vos contrats internationaux.»
Les entreprises exportatrices canadiennes qui utilisent des instruments financiers pour atténuer le risque de change devraient se renseigner sur la Garantie de facilité de change d’EDC, qui pourrait les aider à libérer une partie de leur fonds de roulement.
«La Garantie de facilité de change d’EDC permet aux entreprises d’éviter d’affecter un bien en garantie comme assurance de paiement de la société qui fournit les services de change, ce qui leur permet de conserver leurs liquidités pour leurs activités, explique-t-il. Ainsi, les entreprises peuvent mieux prévoir leurs flux de trésorerie ainsi que leur rentabilité et être plus concurrentielles.»
3 techniques de couverture naturelle que les entreprises peuvent utiliser
Si vous venez tout juste de commencer à l’international, envisagez également d’utiliser des techniques de couverture naturelle pour protéger vos revenus des fluctuations des devises, à condition que vous soyez au courant de leurs limites.
Voici trois techniques que votre entreprise peut utiliser.
1. Facturer en dollars canadiens
«Le fait de payer vos factures et de percevoir des revenus dans la même devise est une protection naturelle contre les fluctuations des devises, indique Phil Turi. Toutefois, en utilisant cette stratégie, vous perdez beaucoup de contrôle.»
D’abord, acheter et vendre en dollars canadiens désavantage votre entreprise sur le plan concurrentiel si votre clientèle ou les entreprises auprès desquelles vous vous approvisionnez ne sont pas canadiennes. Les clientes et clients s’attendent à acheter des biens et des services dans leur monnaie locale et sont beaucoup plus susceptibles d’«abandonner leur panier» en découvrant que le paiement doit se faire en dollars étrangers.
Ce n’est pas toujours pratique si l'approvisionnement et la clientèle de votre entreprise se trouvent principalement à l'étranger.
2. Transférer le risque de change à l'acheteur.euse
Cela se fait au moyen d’une entente contractuelle avec les personnes qui achètent vos biens ou services, selon laquelle vous établissez un prix en fonction du taux de change du jour. Une clause du contrat stipule que si le risque de change n’est pas en faveur de l'organisme vendeur, le prix sera rajusté en fonction du changement.
«Dans certains cas, il pourrait y avoir une entente des deux parties pour séparer la différence, explique Phil Turi. Par contre, ces modalités peuvent être très difficiles à négocier dans les contrats de vente.»
3. Augmenter votre prix de vente à l’exportation
«Si vous jugez que vous avez un avantage concurrentiel local ou que votre produit a une valeur inégalée sur le marché, vous aurez peut-être un plus grand pouvoir en matière de prix. Vous pouvez augmenter votre prix de vente à l’international et utiliser cette augmentation de la marge pour vous protéger contre le risque de change.»
Phil Turi prévient que les entreprises qui utilisent cette stratégie ne maximisent peut-être pas les occasions de vente.
«Il y a des entreprises qui le font depuis des années, mais elles comptent sur des marges élevées, ajoute-t-il. Il y a de fortes chances qu’une entreprise génère des ventes plus élevées grâce à une stratégie d’établissement de prix concurrentielle.»
Risque de change lié à l’utilisation des plateformes de commerce électronique
De nombreuses entreprises canadiennes réalisent des ventes à l’international au moyen de plateformes de commerce électronique, ce qui est une façon rentable de percer de nouveaux marchés. Amazon et Shopify facilitent les transactions étrangères en devises locales. Toutefois, n’oubliez pas que même si ces plateformes facilitent les paiements, elles ne garantissent pas les flux de trésorerie.
«À un moment ou à un autre, vous devrez revenir à votre monnaie. Vous devrez convertir ces ventes en devises étrangères en dollars canadiens afin de pouvoir payer les salaires et les autres coûts ici. Les entreprises exportatrices doivent être consciente de cette réalité commerciale.»
Inclure le risque de change dans votre plan d’exportation
Phil Turi conseille aux entreprises de réfléchir au risque de change dès qu’elles envisagent de vendre à l’extérieur du Canada. L’effet du risque de change sur vos marges, vos prix et vos liquidités, surtout lorsque le volume des ventes augmentera, devient un facteur stratégique à considérer pour l’entreprise.
Le risque de change peut avoir une incidence surtout sur la compétitivité de vos prix.
«Il y a beaucoup de facteurs qui entrent en ligne de compte dans la tarification, comme la taille du marché local, la concurrence, les coûts des ventes, les taxes, les barrières tarifaires et non tarifaires et, bien sûr, la distribution des produits», rappelle-t-il.
«Dès que vous prévoyez avoir une présence soutenue sur les marchés internationaux, vous devez évaluer le niveau de risque de votre entreprise par rapport à l’exposition au change.»
En fin de compte, la façon dont vous décidez de gérer ce risque dépend du niveau d’exposition et de la certitude dont vous avez besoin.
«Votre approche, ou votre politique, à l’égard du risque de change doit être fondée sur le type de résultats de fin d’exercice que vous jugez acceptables, explique Phil Turi. Si, comme la plupart des gestionnaires selon moi, vous préférez des résultats de fin d’année plus prévisibles et positifs, votre meilleure option consiste à utiliser des outils pratiques d’atténuation du risque de change.»